Matei CAZACU Préface
Publicăm Prefața semnată de istoricul Matei Cazacu la ediția franceză a cărții lui Andrei Oișteanu. Les images du Juif. Cliches antisémites dans la culture roumaine. Une approche comparative, trad. Pompiliu Stefănescu, Préface et Glossaire Matei Cazacu. Paris, Non Lieu, 2013.
Matei Cazacu este cercetător la CNRS și membru al Consiliului ştiinţific al Institutului de Investigare a Crimelor Comunismului şi Memoria Exilului Românesc (IICCMER), organism guvernamental care se ocupă de administrarea şi analizarea memoriei regimului comunist în România.
Voici un livre important et nécessaire qui n'aurait jamais pu paraître sous un régime totalitaire de gauche ayant relégué l'imagologie ethnique et notamment l'image du Juif au rang des accessoires de l'idéologie nazie d'un Julius Streicher ou d'un Joseph Goebbels. Et pourtant, l'imaginaire collectif de l'Europe médiévale et moderne, si divers et varié selon les pays et les époques, comporte un formidable corpus de textes et d'images sur le Juif, incarnation, aux yeux des chrétiens, de tous les maux de la terre. Evidemment, la Roumanie ne fait pas exception à cette règle et Andrei Oisteanu a fait un beau travail de recherche dans les écrits de toutes sortes, tant populaires que cultes, pour en faire son miel. Mais la plupart de ces clichés et stéréotypes ont circulé d'un bout à l'autre de l'Europe et la découverte de leur première apparition réserve souvent des surprises. A tel point, que l'auteur s'est aventuré dans toute la culture européenne, tant écrite que picturale, pour dénicher les morceaux d'un puzzle qui est devenu une histoire comparée des mentalités. C'est ce qui rend ce livre si important.
Quant à son caractère nécessaire, il faut préciser qu'il identifie bon nombre de ces clichés et stéréotypes négatifs dans le discours public d'un pays, la Roumanie, qui a vu, à l'aube du 3e millénaire, sa population descendre à quelques milliers de personnes. Antisémitisme sans Juifs ? Une situation que l'on croyait propre seulement à la Russie du Moyen Age, avant que les partages de la Pologne n'englobent dans l'empire des tsars la plus importante communauté juive du monde. Et pourtant, les faits sont là et bien têtus, et Andrei Oisteanu s'est donné la peine de les enregistrer et de les discuter. Mais comment en est-on arrivé là ?
La chute du régime communiste en Roumanie et dans les autres pays de l'Est a eu comme conséquence la libération de la parole orale et écrite, étouffée par quatre décennies de terreur qui avaient tenté d'instaurer le règne sans partage de la langue de bois et du politiquement correct suivant en cela la ligne, ô combien sinueuse, du parti et de la pensée uniques. La Novlangue, entreprise comparable à la construction de la Tour de Babel (Genèse, XI, 1-9), a eu la même fin que son modèle biblique et a laissé la place à la multitude et à la diversité d'expression. Tout un chacun qui avait (ou croyait avoir) quelque chose à dire et qu'il n'avait pu exprimer autrement que par le biais des blagues politiques, des épigrammes, des fables et des proverbes, s'employa à mettre par écrit et à diffuser sa vérité à lui, sa mémoire individuelle, l'élevant au rang de mémoire collective ou même historique. La multiplication des journaux, des revues et des maisons d'édition, des postes de radio et des chaînes de télévision, puis l'apparition du net, vint à point nommé pour absorber ce torrent de paroles qui s'est déversé dans l'espace public tel un fleuve brisant un barrage. En tombant les uns après les autres, les tabous ont laissé le champ libre à toutes les idées et fantasmes refoulés, à tous les souvenirs enfouis, à tous les témoignages non dits. On y trouvait du tout, du sublime à l'abjecte, du beau et du repoussant, du grandiose et du mesquin, exactement comme dans l'histoire des langues d'Esope[1].
Un des thèmes récurrents de cette anamnèse a été - et est encore - la Deuxième Guerre Mondiale et ses conséquences, un traumatisme majeur de la société roumaine auquel s'est ajouté, après trois années de transition (1945-1947), l'instauration du régime communiste, un des plus féroces et des plus meurtriers de l'Europe de l'Est. Durant toutes ces décennies, les communistes ont occulté par tous les moyens - et ils ne s'en sont pas privés - ce qui avait été le déroulement de la première partie, à savoir la guerre à l'Est de la Roumanie, d'abord seule (juin 1940 - juin 1941)[2], puis en Alliance avec l'Allemagne hitlérienne (juin 1941-août 1944). Ce faisant, ils privilégiaient seulement les neuf derniers mois lorsque la Roumanie, vaincue à l'Est et ayant capitulé, avait continué de combattre, cette fois-ci aux côtés de ses anciens adversaires, à l'Ouest (23 août 1944- 8 mai 1945). La vulgate communiste avait établi que l'an 0 de l'histoire récente était ce grand renversement d'alliances raté par l'Italie et la Hongrie, mais réussi par la Roumanie et qui avait sauvé le pays du désastre. Mais ce même événement avait permis au parti communiste, fort d'une poignée de membres, de s'emparer du pouvoir à l'ombre des tanks soviétiques. Tout le reste n'était que ténèbres indignes de retenir l'attention sauf pour les condamner et les vouer aux gémonies de l'ire prolétarienne.
En s'efforçant d'effacer de la mémoire collective ce chapitre fondateur, les communistes n'étaient pas à une contradiction près. Il y avait, tout d'abord, les soldats, dont certains avaient combattu sur les deux fronts, mais qui ne recevaient des pensions d'invalidité que pour les blessures reçues à l'Ouest - les blessures à l'Est, la captivité pour environ 300.000 hommes, les médailles pour des actions héroïques, mais aussi les morts, plus de 200.000 hommes - ne comptaient pas. Seules comptaient les neuf mois de guerre "juste", les trois années précédentes n'existaient pas quand elles n'étaient cause d'arrestations, de procès et de lourdes condamnations pour crimes de guerre.
La réécriture de l'histoire nationale avait revêtu l'impérialisme russe en direction de Constantinople et des Détroits, condamné en leur temps même par Marx et Engels, des vertus d'une guerre incessante de libération des peuples opprimés, dont les Roumains qui avaient subi pas moins de douze invasions russes entre 1711 et 1944. La guerre avec l'URSS, (la première invasion roumaine contre son voisin !), faisait figure de tache noire sur le passé et les criminels de guerre avec, à leur tête, le maréchal Ion Antonescu, "Conducator" (équivalent de Duce, Führer) de la Roumanie (1940-1944), avaient été jugés et lourdement condamnés. Et pourtant, ce même régime communiste, mué en national-communisme sous Nicolae Ceausescu, avait entamé dans les années '80 une certaine réhabilitation du Conducator en tant que chef militaire, mais aussi parce qu'il avait écrasé le mouvement d'extrême droite de la Garde de Fer. Même s'il s'agissait d'une diversion destinée à noircir l'image du roi Michel (1940-1947), qui avait arrêté Antonescu et ordonné la fin des hostilités à l'Est, et qui était de plus en plus perçu comme une alternative au régime, cette manoeuvre a eu comme résultat la publication de toute une série d'ouvrages et d'articles destinés à semer le trouble dans l'esprit de la population[3]. De l'incarnation du mal absolu, Antonescu devenait un héros malheureux, et ceci dans un contexte de tension avec l'URSS de Brejnev et de ses successeurs : Ceausescu avait besoin de la fidélité de l'armée qui réclamait la reconnaissance pour ses campagnes non seulement à l'Ouest, mais aussi à l'Est. Le combat du Conducator pour libérer les provinces arrachées par l'URSS en 1940 se trouvait ainsi justifié par ceux-là mêmes qui l'avaient condamné à mort et exécuté en 1946 ! De la sorte, le message envoyé par le pouvoir prenait la forme d'une revendication territoriale que Ceausescu avait ouvertement adressée à Gorbatchev lors du dernier congrès du P.C.R. en novembre 1989.
C'est sur ce terrain miné par des décennies de censure et de faux qu'est apparu le débat légitime et nécessaire sur l'autre volet de l'action d'Antonescu, sa politique intérieure. L'aspect le plus détestable et criminel de cette politique avait été, sans aucun doute, la persécution, la paupérisation, la déportation et la destruction d'une partie de la population juive qui représentait en 1939 la troisième plus importante communauté d'Europe avec environ 735.000 personnes, de même que d'une partie de la minorité tsigane (rrom). Cette Shoah roumaine, parallèle et indépendante de celle nazie, avait été mise en lumière dès 1946-1947 par Matatias Carp dans son livre Cartea Neagra. Le livre noir de la destruction des Juifs de Roumanie 1949-1944, traduit du roumain, annoté et présenté par Alexandra Laignel-Lavastine, Paris, Denoël, 2009. Quelques études et témoignages des survivants avaient suivi puis en 1986 paraissaient à New York les douze volumes de documents officiels sélectionnées par Jean Ancel des archives roumaines[4]. Les années suivantes ont vu se multiplier les publications de toutes sortes et enregistré des positionnements des historiens dans une quête commune mais trop souvent conflictuelle afin de reconstituer une image vraie et sincère de cette période cruciale de l'histoire roumaine[5].
Le renouveau - en fait on peut parler d'une véritable naissance - des études juives en Roumanie s'est traduit par la création de quatre centres de recherches : L'Institut de judaïstique et histoire juive Dr. Moshe Carmilly à l'Université de Cluj-Napoca, qui publie depuis 1992 la revue Studia Judaica ; un centre similaire à l'Institut d'histoire A. D. Xenopol de l'Académie roumaine à Iasi, qui édite Studia et acta historiae Judaeorum Romaniae (depuis 1996) ; le Centre pour les études hébraïques Goldstein-Goren près de l'Université de Bucarest, avec la revue Studia Hebraica (à partir de 2001), qui collabore étroitement avec le Centre Goldstein-Goren pour l'étude de l'histoire des Juifs de Roumanie de l'Université de Tel Aviv, qui publie depuis 1987 la revue Romanian Jewish Studies ; enfin le Centre, Musée et Archive historique de la communauté juive de Roumanie et la maison d'édition Hasefer de Bucarest, qui publient depuis 1998 un Bulletin spécialisé.
Un effort tout particulier a été entrepris après 1990 sur l'édition des documents officiels et des témoignages de première main, tout comme des synthèses sur les années décisives de l'entre-deux-guerres qui ont vu apparaître et envahir l'espace public le débat sur la "question juive", greffée sur l'antisémitisme traditionnel propre aux sociétés chrétiennes de confession orthodoxe qui avaient connu jusque là surtout une forme de "tolérance hostile" ou d'"apartheid mou" envers les non-chrétiens[6]. Ces mêmes années ont été témoins des premières lois antijuives, copiées d'après les lois raciales de Nuremberg, et du processus de retrait de la nationalité roumaine qui a frappé, entre 1938 et 1940, pas moins de 36,7% de la population juive, soit un total de 225.222 personnes. Les plus importants émetteurs du discours antisémite ont ainsi été identifiés et leur idéologie a fait l'objet d'un nombre important de contributions issues de tous les horizons[7]. Et pour la première fois ont été édités ou réédités les écrits et mémoires des membres et des thuriféraires de la Garde de Fer et du Parti National Chrétien du poète Octavian Goga et du professeur Alexandre C. Cuza de l'Université de Iasi[8].
Nous arrivons maintenant à la période la plus dramatique de l'histoire des Juifs roumains : les études et les publications de documents et de témoignages sur les années 1940-1944 pourraient remplir une bibliothèque. Une première catégorie de publications comporte l'édition des lois et décrets antijuifs[9], de même que les sténogrammes des séances du Conseil des Ministres des gouvernements Antonescu entre septembre 1940 et août 1944[10]. Ont suivi les synthèses sur la Shoah en Roumanie[11] et sur ses différentes étapes : la rébellion légionnaire de janvier 1941 qui a marqué la rupture de l'alliance entre Antonescu et la Garde de Fer , le pogrom de Iasi (29 juin 1941)[12], de même que des études sur le sort des Juifs roumains et hongrois de Transylvanie du Nord sous occupation hongroise (septembre 1940-octobre 1944)[13], enfin de ceux de Moldavie, de Bessarabie et de Bucovine du Nord déportés en Transnistrie entre 1941 et 1944. Si l'on ajoute la reconstitution des actions de sauvetage des Juifs par des Roumains, depuis la Reine mère et le métropolite de Transylvanie Nicolae Balan, le maire de Cernauti Traian Popovici, et jusqu'aux paysans de Moldavie, de Bessarabie, de Transnistrie et de Transylvanie, nous avons une image assez complète du tableau d'ensemble de la Shoah en Roumanie[14].
Dans cet effort de construction de la mémoire collective et historique des Juifs de Roumanie, le livre d'Andrei Oisteanu occupe une place à part. Paru dans sa première édition en 2001, suivie d'une seconde en 2004 et de traductions en hongrois, en anglais et en allemand, il s'inscrit à la fin d'une période d'intenses débats et confrontations sur le rôle des Juifs dans la culture et dans l'histoire roumaines. Dans ses Préliminaires, l'auteur précise qu'il a tenté "de suivre la façon dont est né et a évolué l'antisémitisme populaire dans l'espace culturel roumain. Mais aussi comment l'antisémitisme populaire (inconscient et passif) a influencé l'antisémitisme politique (conscient et actif) depuis le milieu du XIXe siècle à nos jours". Il apparaît comme une somme des connaissances et des opinions sur une communauté aujourd'hui pratiquement disparue, comme cela a été le cas également en Pologne, mais dont les souvenirs restent vivaces et curieusement actuels. Entre le Juif réel et le Juif imaginaire, entre les Juifs du Nouveau Testament et ceux des croyances et imageries paysannes, et jusqu'aux écrits relevant de la haute culture écrite, les clichés qui composent son portrait physique, socio-professionnel, moral, magico-mythique et religieux, restent fascinants par leur force et leur durée. Et il me semble hors de doute que l'Eglise Orthodoxe, qui n'a pas entrepris l'Aggiornamento de l'Eglise Catholique (le Concile Vatican II et le document Nostra AEtate) porte une lourde part de responsabilité dans cet état de choses. J'en veux pour preuve les Eloges (Prohod, en roumain "lamentations des morts") que l'on chante encore aujourd'hui lors des matines du samedi de Pâques, époque où se déclenchaient la plus grande partie des pogroms de Russie et d'ailleurs. Voici quelques exemples :
Les fils de la tribu de Juda issus d'une source amère, déposèrent dans une fosse Jésus qui les avait nourris en leur donnant la manne.
Orgueilleux Israël, peuple homicide, de quoi te plaignais-tu, pour délivrer Barabas et livrer ton Sauveur à la croix ?
Peuple envieux, assassin, trompeur, si du moins tu avais eu honte devant les linceuls et le suaire lui-même du Christ ressuscité!
Viens donc ici, infâme, disciple assassin ; découvre-moi la mesure de méchanceté qui t'a fait livrer le Christ.
Tu prenais le masque d'un ami des hommes, fou et aveugle, tout couvert de crimes et implacable, toi qui vendis l'aromate à prix d'argent.
Quel prix as-tu reçu du céleste aromate ? Qu'as-tu obtenu en échange de sa valeur ? Tu as trouvé la folie furieuse, maudit Satan.
Si tu es l'ami des pauvres et si tu t'attristes de l'effusion d'un parfum pour la consolation d'une âme, comment as-tu vendu la lumière à prix d'or ?
Etant le chef de la vie, ô Verbe, Vous n'avez pas fait mourir les Juifs, une fois étendu en croix, mais vous avez ressuscité leurs morts.
Race des Hébreux pillards et pleine d'astuce, tu as connu la reconstruction du temple : est-ce pour cela que tu as condamné le Christ ?
Si encore, Juifs, la honte vous accablait au souvenir de ceux que le Vivificateur a ressuscité des morts ; mais vous L'avez étendu sur la croix par envie.
Selon Salomon, la bouche des Juifs prévaricateurs est un gouffre profond.
Dans les voies obliques des Hébreux prévaricateurs, il y a des chausse-trapes et des filets.
Ils périront tous, ceux qui Vous ont crucifié, Fils de Dieu, Roi de l'Univers.
Ils périront tous dans le puits de perdition, les hommes de sang[15].
On découvre dans ce chant qu'entonnent tous les fidèles orthodoxes à Pâques, la plus grande fête chrétienne, une bonne partie des clichés sur les Juifs, peuple déicide, trompeur, envieux, prévaricateur, plein d'astuce, avide d'or et de richesses pour lesquelles il n'hésite pas à sacrifier le Sauveur. Il n'est donc pas étonnant que ces clichés se retrouvent dans la paysannerie qui forme la majorité de la population roumaine (78% en 1948) et qui a retrouvé après 1989, avec la liberté religieuse, la liberté d'expression. Et c'est parmi les intellectuels issus de ses rangs et formés à l'époque communiste que l'on trouve le plus grand nombre d'antisémites et de négationnistes de la Shoah, d'une part, et de manipulateurs de la mémoire collective, d'autre part.
Pour revenir au contexte des années '90, il faut préciser que les principaux bénéficiaires de la politique antijuive des gouvernements Antonescu ont été, après l'élimination de la Garde de Fer (janvier 1941), le Grand Etat Major de l'Armée et le Ministère de la Guerre, la police et la gendarmerie, chose assez naturelle à une époque de dictature militaire et, qui plus est, en temps de guerre[16]. Or, l'armée bénéficiait depuis la révolution de décembre 1989, et continue de bénéficier, d'une grande popularité dans l'opinion publique roumaine, comparable seulement à celle de l'Eglise Orthodoxe[17]. Evoquer les persécutions des Juifs et la Shoah perpétrés en bonne partie par des hommes en uniforme, jetait une ombre sur l'image héroïque que les historiens militaires, très nombreux et influents sous le régime Ceausescu, s'efforçaient de construire depuis quelques décennies, et qui avait connu un regain d'intensité avec l'évocation de la guerre à l'Est.
Il y avait aussi la position de l'Eglise Orthodoxe Roumaine, car les prêtres et les étudiants en théologie avaient fourni un contingent important à la Garde de Fer et au Parti National Chrétien avant 1941. Leur influence sur la masse des fidèles, notamment paysans, était importante, car leur discours politique reprenait des thèmes religieux et se présentait enrobé de citations et images bibliques comme un sermon délivré du haut d'un ambon. A l'époque communiste, l'Eglise Orthodoxe, Eglise "nationale" car englobant l'immense majorité de la population roumaine, avait subi, certes, des persécutions, mais avait été récompensée pour sa contribution à la suppression de l'Eglise Gréco-Catholique unie avec Rome (1948) et à la propagande officielle pour le Mouvement international de la Paix et autres initiatives du bloc communiste. Après une dernière confrontation en 1958-62 (suppression de bon nombre de monastères, chasse de religieux et de religieuses de leurs couvents, limitation de l'accès des jeunes au monachisme, arrestations de proches collaborateurs du patriarche Justinian qui a été placé en arrêt à domicile , etc), les rapports de l'Eglise avec l'Etat s'étaient détendus notamment sous le règne des deux successeurs de ce dernier, Justin (1977-1986) et Teoctist, bien plus dociles que leur prédécesseur, comme l'a prouvé l'affaire des démolitions des églises après 1977 et la persécution du prêtre dissident Gheorghe Calciu-Dumitreasa.
Enfin, une bonne partie des résistants anti-communistes qui avaient combattu, souvent au prix de leur vie et les armes à la main, le régime communiste entre 1946 et 1962, étaient légionnaires et/ou anciens militaires, et leurs mémoires et témoignages de combats et de prison connaissaient un formidable succès de librairie[18].
De la sorte, les nationalistes et les ultranationalistes roumains qui ont retrouvé la liberté de parole après 1990 comptaient dans leurs rangs bon nombre d'officiers actifs ou à la retraite, des anciens résistants anticommunistes et des membres du clergé[19].
En effet, parallèlement à la construction de la mémoire collective des Juifs de Roumanie, s'est édifiée la mémoire collective de la population roumaine qui s'est concentrée essentiellement sur les années 1945-1989, les années de l'instauration et du triomphe du régime communiste, des années de mensonges et de déformations grossières de la réalité. Même si les souvenirs des combattants sur le front de l'Est et les ouvrages d'histoire militaire restent nombreux, ce qui domine est le souvenir de la terreur, des privations et des assassinats organisés et commis par les autorités communistes durant les quatre décennies clos par la révolution de décembre 1989. C'est dans ce contexte, qui n'est pas propre seulement à la Roumanie, qu'est apparu et s'est répandu le stéréotype du "communisme juif", importé et installé par les Juifs agents de Moscou[20]. En Roumanie, le porteur le plus virulent de ce stéréotype est le parti România Mare (La Grande Roumanie), apparu en 1990, et son leader, le poète Corneliu Vadim Tudor. En réponse à un discours du grand rabbin Moses Rosen (en poste entre 1948-1995), par ailleurs collaborateur actif du régime communiste notamment à l'époque de Ceausescu qu'il défendait devant le Sénat américain dans l'affaire de la clause de la nation la plus privilégiée, en réponse donc aux affirmations sur l'Holocauste en Roumanie[21], C.V. Tudor a lancé une campagne de presse sous le titre "Qui a apporté le bolchévisme, la terreur et le crime en Roumanie?"[22]. Même s'il n'était pas le premier auteur à soulever ce problème, C.V. Tudor a été le plus radical et a été suivi par bien d'autres qui ont forgé les expressions "Génocide communiste"[23], "Holocauste rouge"[24], "Holocauste contre le peuple roumain"[25] etc. Le général Ion Mihai Pacepa, un autre collaborateur de Ceausescu qui a choisi la liberté en 1978, a signé un Livre noir de la Securitate[26], un rappel évident du livre de Matatias Carp.
Le débat n'est pas nouveau et il ne se réduit pas à la seule Roumanie. Il a commencé, en effet, après 1918 et la Révolution d'octobre et dure encore tant pour la Russie que pour les autres pays ex-communistes[27]. Mais dans ce cas précis, il a engendré un phénomène diversement appelé "martyrologie compétitive", "la compétition Shoah-Gulag" ou bien le "choc des mémoires"[28]. L'intensité de cette polémique était telle, qu'en juillet 2002, lors d'une visite dans sa ville natale, Sighet, Elie Wiesel, Prix Nobel de la Paix, a rendu hommage aux victimes de la Shoah qui comprenaient également sa famille[29], mais a refusé de se rendre au Mémorial de la même ville organisé dans l'ancienne prison par la Fondation l'Académie Civique en souvenir des victimes du communisme[30]. Il s'est ensuivi une nouvelle polémique dans les médias qui ont repris les arguments des historiens roumains et étrangers sur la politique d'Antonescu envers les minorités juive et tsigane[31], et notamment le nombre des victimes juives[32]; sur l'attitude de certains segments de la population juive de Bessarabie lors du retrait des troupes roumaines ( des cas de lynchage de soldats et d'officiers) en juin 1940[33] qui a entraîné des représailles sanglantes et totalement disproportionnées en 1941 lors de la reconquête de la province trouvée dans un état de désolation suite à la politique soviétique de la terre brûlée, réalisée en collaboration avec certains communistes juifs[34] ; sur les efforts de nombreux Roumains pour aider et sauver les Juifs entre 1938 et 1944[35], dont une partie a pu émigrer en Palestine ou ailleurs[36] ; sur la bonne administration et gouvernance de la Transnistrie par les autorités roumaines[37] ; enfin, sur la participation massive et enthousiaste de nombreux membres de la communauté juive à l'instauration du régime communiste sous la protection de l'armée soviétique[38] et sur les facilités pour partir en Israël afin d'échapper au communisme[39] ; enfin l'accusation d'avoir pratiquement dirigé les organes de répression comme la Securitate, la milice et le personnel pénitencier[40], en plus des structures politiques[41] et culturelles[42].
C'est dans cette atmosphère passionnée que le président Ion Iliescu a annoncé, le 22 octobre 2003, la création de la Commission internationale pour l'étude du Holocauste en Roumanie sous la présidence d'Elie Wiesel. La Commission a rendu public son rapport en novembre 2004, rapport qui concluait que "La Roumanie a commis un génocide à l'encontre des Juifs...Les autorités roumaines portent la responsabilité principale tant pour la planification que pour l'application de l'Holocauste"[43]. Tout était dit, et l'impact du rapport a été profond[44]. Cependant, les polémiques ont continué et pour mettre fin à ce débat houleux le nouveau président Traian Basescu a chargé le professeur Vladimir Tismaneanu, un expert internationalement reconnu dans l'étude du communisme, de créer à son tour une Commission pour l'analyse de la dictature communiste en Roumanie. Le rapport final de la Commission a été rendu public en décembre 2006 et le 18 du même mois, Traian Basescu a tenu devant le parlement un discours officiel de condamnation du régime communiste qualifié lui aussi de criminel[45]. Le discours présidentiel a été émaillé par des incidents provoqués par Corneliu Vadim Tudor et ses acolytes, les seuls nostalgiques déclarés du communisme en Roumanie.
De la sorte, la Roumanie a réalisé sa Vergangenheitsbewältigung, ou du moins on peut l'espérer. Dans ce climat nouveau, le livre d'Andrei Oisteanu est une invitation à la connaissance non seulement de l'autre, mais aussi et surtout de soi-même, condition nécessaire pour la tolérance et l'acceptation du passé afin de ne plus répéter ses erreurs. Et il nous semble que l'ouvrage suivant de cet auteur, ouvrage que nous appelons de nos voeux, devra êtreL'image du Roumain dans la culture juive.
Matei Cazacu
[1] La Fontaine, La vie d'Esope le Phrygien, dans Idem, Oeuvres complètes, I, Fables, contes et nouvelles, éd. Jean-Pierre Collinet, Paris, Gallimard, 1991, p. 17. (La Pléiade).
[2] Lorsque l'URSS a présenté un ultimatum brutal à la Roumanie réclamant la cession de deux provinces peuplées en majorité de Roumains - la Bessarabie et la Bucovine du Nord - dans un délai de trois jours, sous la menace de la guerre. Dans la confusion qui s'en est ensuivie, les Soviétiques ont pris aussi le territoire de Herta qui ne figurait pas dans l'ultimatum. La Roumanie a cédé mais elle n'a pas renoncé à l'idée de récupérer les provinces perdues. Cette réalité a été affirmée avec force par deux hommes politiques roumains situés aux extrémités de l'échiquier politique : le premier est l'ancien ministre des Affaires étrangères et ancien ministre de Roumanie à Moscou, Grégoire Gafenco,Préliminaires de la Guerre à l'Est. De l'accord de Moscou (21 août 1939) aux hostilités en Russie (22 juin 1941), Paris et Fribourg, L.U.F. et Egloff, 1944, p. 363 et suiv., 370 et suiv. Le second est le maréchal Ion Antonescu qui a déclaré lors de son procès de 1946 :"Je ne peux être considéré comme agresseur, car la Roumanie se trouvait en état de guerre avec l'URSS depuis juin 1940, lorsque la Russie a été l'agresseur." (Procesul maresalului Antonescu. Documente (Le procès du maréchal Antonescu. Documents), éd. Marcel-Dumitru Ciuca, Bucarest, Saeculum I.O. et Europa Nova, 1996, p. 167).
[3] Citons seulement le roman Delirul (Le délire) de Marin Preda, écrivain officiel, et le recueil de documents Antonescu, Maresalul României si rasboaiele de reîntregire (Antonescu, le maréchal de la Roumanie, et les guerres de reconstitution de la Grande Roumanie), publiés par Mihai Pelin, écrivain proche de la Securitate (police politique roumaine) pour le compte de Iosif Constantin Dragan, millionnaire italien d'origine roumaine et ami de Ceausescu, à Venise et Milan, Editions Nagard , 1986-1990, en cinq volumes.
[4] Jean Ancel, Documents concerning the fate of Romanian Jewry during the Holocaust, New York, Beate Klarsfeld Foundation, 1986.
[5] Un répertoire complet des publications concernant l'histoire des Juifs de Roumanie a été donné par Jean Ancel et Victor Eskenasy, Bibliography of the Jews in Romania, Tel Aviv University, The Goldstein-Goren Center for the history of Jews in Romania, 1991. (Publications of the Diaspora research Institute, 82). Pour l'histoire générale de la Roumanie, incluant après 1990 aussi les publications étrangères à ce sujet, voir Gheorghe Hristodol et alii, Bibliografia istorica a României (Bibliographie historique de la Roumanie), VIII, 1989-1994. Bibliografie selectiva(Bibliographie sélective), Bucarest, Editura Academiei Române, 1996 ; Idem, pour les années 1994-1999, Cluj-Napoca, 2000 ; Idem, pour les années 1999-2004, Bucarest, 2005. La publication continue.
[6] Voir Matei Cazacu, "Les Juifs de Roumanie au XXe siècle", dans Historical Yearbook, 6 (Bucarest, 2009), p. 137-160, ici p. 138. Andrei Oisteanu l'appelle "antisémitisme populaire (inconscient et passif)".
[7] Citons d'abord la traduction roumaine de la contribution de Eugen Weber sur la droite en Roumanie (1965), sous le titre Dreapta româneasca, éd. Achim Mihu, Cluj, Dacia, 1995 ; Zigu Ornea, Anii treizeci. Extrema dreapta româneasca(Les années '30. L'extrême droite roumaine), Bucarest, Editura Fundatiei Culturale Române, 1995 ; Leon Volovici, Ideologia nationalista si "problema evreiasca". Eseu despre formele antisemitismului intelectual în România anilor 30(L'idéologie nationaliste et la "question juive". Essai sur les formes de l'antisémitisme intellectuel dans la Roumanie des années '30), Bucarest, Humanitas, 1995 ; Dumitru Hâncu, éd., Marturii. "Chestiunea evreiasca". Antologie si introducere de...,(Témoignages. "La question juive". Anthologie et introduction de...), Bucarest, Hasefer, 1996; Ioan Scurtu et alii, Totalitarismul de dreapta în România. Origini, manifestari, evolutie 1919-1927 (Le totalitarisme de droite en Roumanie. Origines, manifestations, évolution), Bucarest, Institutul National pentru studiul totalitarismului, 1996 ; Gheorghe Buzatu et alii, Radiografia dreptei românesti (1927-1941) (Radiographie de la droite roumaine), Bucarest, Editura FFPress, 1996 ; Viorica Nicolenco, Extrema dreapta în Basarabia (1923-1940) (L'extrême droite en Bessarabie), Chisinau, Editura Civitas, 1999 ; Jean Ancel, Contributii la istoria României. Problema evreiasca 1933-1944(Contributions à l'histoire de Roumanie. La question juive 1933-1944), 3 vols en quatre parties, Bucarest, Hasefer, 2001-2003. Voir aussi Carol Iancu, Les Juifs en Roumanie (1919-1938). De l'émancipation à la marginalisation, Paris-Louvain, 1996.
[8] Et de bien d'autres, morts ou vivant en exil, ou en Roumanie comme Faust Bradescu, Nistor Chioreanu, Corneliu Georgescu, Vasile Marin, Serban Milcoveanu, Constantin Papanace, Nicolae Patrascu,Horia Sima. Les plus actives maisons d'édition spécialisées dans ce genre de publications sont Majadahonda à Bucarest et Gordian à Timisoara.
[9] Lya Benjamin, éd., Evreii din România între anii 1940-1944, I, Legislatia antievreiasca (Les Juifs de Roumanie entre 1940-1944. La législation antijuive), Bucarest, Hasefer, 1993.
[10] Lya Benjamin, éd., Evreii din România între anii 1940-1944, vol.II-IV, Problema evreiasca în stenogramele Consiliului de Ministri. Perioada unei mari restristi (Le problème juif dans les sténogrammes du Conseil des ministres. Une période de grandes malheurs), Bucarest, Hasefer, 1996-1998 ; Marcel-Dumitru Ciuca et alii, Stenogramele sedintelor Consiliului de ministri. Guvernarea Ion Antonescu (Les sténogrammes du Conseil des ministres. Le gouvernement Ion Antonescu), 2 vols, Bucarest, 1997-8. Voir aussi le recueil de documents éd. par Alesandru Dutu et Constantin Botoran, Al doilea razboi mondial. Situatia evreilor din România, (La Deuxième Guerre Mondiale. La situation des Juifs de Roumanie), I (1939-1941), 2 vols., Cluj, 1994.
[11] Citons seulement les ouvrages de Jean Ancel, Randolph L. Braham, Mariana Hausleitner, Radu Ioanid, Andrei Pippidi, et les documents publiés par les Editions Hasefer en 1991,A. Siperco, Ottmar Trasca et Dennis Deletant,etc. Enfin est paru, en 2011, un massif volume L'Horreur oubliée : la Shoah roumaine, numéro spécial de la Revue d'histoire de la Shoah, n° 194 (Paris, janvier-juin 2011) avec des contributions de spécialistes roumains, français et israëliens. Parmi les personnages cités dans le livre d'Andrei Oisteanu, ont été déportés en Transnistrie les écrivains Sergiu Dan et Norman Manea, de même que Wilhelm Filderman.
[12] Gheorghe Buzatu, éd., Evenimentele din ianuarie 1941 în arhivele germane si române (Les événements de janvier 1941 dans les archives allemandes et roumaines), 2 vols, Bucarest, Editura Majadahonda, 1998 ; Jean Ancel, Preludiu la asasinat. Pogromul de la Iasi, 29 iunie 1941 (Prélude à l'assassinat. Le pogrom de Iasi, 29 juin 1941), Iasi, Polirom, 2005.
[13] Voir infra, note 29.
[14] La bibliographie de la question est importante. Outre l'ouvrage déjà cité de Jean Ancel et Victor Eskenasy, on retiendra l'article bibliographique de Raphael Vago, "The Holocaust in Romania in the light of Israeli historiography", dans Studia Judaica, 4 (Cluj, 1995), p. 7-21 ;la grande synthèse de Jean Ancel, Contributii la istoria României. Problema evreiasca 1933-1944 (Contributions à l'histoire de Roumanie. Le problème juif 1933-1944), Bucarest, Hasefer, 2001-2003, 3 volumes en quatre parties avec toute la bibliographie de la question.
[15] R.P.E. Mercenier, La Prière des Eglises de rite byzantin, II, Les Fêtes, Monastère de Chevetogne, 1948, p. 218-244, notamment p. 227, 236, 240-242.
[16] Des accusations précises chez Radu Lecca, Eu i-am salvat pe evreii din România, Bucarest, Editura Roza Vânturilor, 1994, passim, et notamment p. 169, 181 sq, 194 sq, 210 sq, 229 sq, 242 sq.
[17] Anneli Ute Gabanyi, Die unvollendete Revolution. Rumänien zwischen Diktatur und Demokratie, Munich et Zurich, Piper, 1990, p. 98-118, 217-220.
[18] Ruxandra Cesereanu, Gulagul în constiinta româneasca. Memorialistica si literatura închisorilor si lagarelor comuniste. Eseu de mentalitati (Le Gulag dans la conscience roumaine. Les mémoires et la littérature des prisons et des camps communistes. Essai sur les mentalités), Iasi, Polirom, 2005. 2e éd.
[19] Tom Gallagher, Democracy and Nationalism in Romania, 1989-1998, Londres,1998 ; je cite d'après l'édition roumaine, Bucarest, ALL, 1999, p. 223.
[20] André Gerrits, "Antisemitism and Anti-Communism : the Myth of the "Judeo-Communism" in Eastern Europe", dans East European Jewish Affairs, 25 (1995), 1, p. 59-72 ; George Voicu, Teme antisemite în discursul public (Thèmes antisémites dans le discours public), Bucarest, Ars Docendi, 2000 ; Hildrun Glass, Minderheit zwischen zwei Diktaturen. Zur Geschichte der Juden in Rumänien 1944-1949, Munich, R. Oldenbourg Verlag, 2002, p. 13 et suiv. avec une riche bibliographie ; voir aussi les contributions de Michael Shafir, Alexandru Florian et George Voicu dans le volume L'Horreur oubliée : la Shoah roumaine, Paris, 2011. (Revue d'histoire de la Shoah, n° 194, janvier-juin, 2011).
[21] Reprises par le New York Times du 2 juillet 1991 et par le Sénat des Etats-Unis dans la résolution 52 du 11 juillet 1991. Voir aussi Moses Rosen, Primejdii, încercari, miracole. Povestea vietii sef rabinului Dr. Moses Rosen (Dangers, épreuves, miracles. Le récit de la vie du rabbin chef Dr. Moses Rosen), Bucarest, Hasefer, 1991.
[22] România Mare, 25 octobre 1991 ; voir Tom Gallagher, op. cit., p. 228.
[23] Gh. Boldur-Latescu, Genocidul comunist în România, I, Dimensiunile genocidului, Bucarest, Editura Albatros, 1992, suivi par au moins trois autres volumes.
[24] Florin Matrescu, Holocaustul rosu, Bucarest, Éditera Fat Frumos, 1998. 886 pages.
[25] Gheorghe Buzatu, Asa a început holocaustul împotriva poporului român. (Evacuarea Basarabiei si a nordului Bucovinei în 1940) (Le début de l'Holocauste contre le peuple roumlain.(L'évacuation de la Bessarabie et de la Bucovine du nord en 1940), Bucarest, Editura Majadahonda, 1995.
[26] Cartea neagra a Securitatii, Bucarest, Omega Press, 1999. 3 vols ; du même, Fata neagra a Securitatii (Le visage noir de la Securitate), Bucarest, Corrida, 1999.
[27] Yuri Slezkine, Le siècle juif, traduction de Marc Saint-Upéry, Paris, La Découverte, 2009, p. 189 et suiv. ; André Gerrits, "art. cit.".
[28] Michael Shafir, "Nuremberg II ? Le mythe de la dénazification et son utilisation dans la martyrologie compétitive Shoah-Goulag", dans L'Horreur oubliée : la Shoah en Roumanie, Paris, 2006, p. 557-581. (Revue d'histoire de la Shoah, n° 194, janvier-juin 2011).
[29] Vasile T. Ciubaucan, "Deportarea evreilor din judetul Maramures în anul 1944 de catre autoritatile de ocupatie ale Ungariei" (La déportation des Juifs du département de Maramures en 1944 par les autorités hongroises d'occupation), dans Maramures, vatra de istorie milenara, 4 (Cluj, 1998), p. 157-164; Vasile T. Ciubaucan et alii, Drumul Holocaustului. Calvarul evreilor din Nord-vestul Transilvaniei sub ocupatia Ungariei 5.IX.1940-25.X.1944 (La route du Holocauste. La calvaire des Juifs du Nord-Ouest de la Transylvanie sous l'occupation hongroise), Cluj, Editura Ciubaucan, 1995 ; Gheorghe Bodea, Tragedia evreilor din nordul Transilvaniei 1944 (La tragédie des Juifs de la Transylvanie du Nord 1944), Cluj, Hiparion, 2001.
[30] La Fondation a organisé, avec des fonds de l'UE, des rencontres annuelles avec des communications qui ont été publiées comme Anul 1948. Institutionalizarea comunismului (L'Année 1948. L'institutionnalisation du communisme), Bucarest, 1998 ; Anii 1949-1953. Mecanismele terorii (Les années 1949-1953. Les mécanismes de la terreur), Bucarest, 1999 ; Anii 1954-1960. Fluxurile si refluxurile stalinismului (Les années 1954-1960. Les flux et les reflux du stalinisme), Bucarest, 2000 ; Ion Balan, Regimul concentrationar în România în anii 1945-1964 (Le régime concentrationnaire en Roumanie dans les années 1945-1964), Bucarest, 2000.
[31] Le mémoire d'Antonescu lors de son procès du 15 mai 1946, publié par Marcel-Dumitru Ciuca, Procesul maresalului Antonescu. Documente, II, Bucarest, 1996, p.174-175 : la paupérisation organisée et la déportation des Juifs en Transnistrie auraient été le souhait de la grande majorité de la population ("la rue") pour la première, et le souci de les mettre à l'abri face à la fureur des extrémistes de droite (Gardes de Fer et Parti National Chrétien) qui préparaient, en coopération avec les Einsatzkommandos allemands, une nouvelle "Saint Barthélemy" en 1941. Une présentation d'ensemble chez Dumitru Sandru, "Guvernul Antonescu si evreii din România" (Le gouvernement Antonescu et les Juifs de Roumanie), dans le volume Istorie si Societate, I, Bucarest, Editura Mica Valahie, 2004, p. 419-482. Voir aussi la réédition du rapport d'activité de la Centrale des Juifs de Roumanie paru en 1944, 2e édition Bucarest, Editura Alma Tip, 1998.
[32] Wilhelm Filderman, "Situatia numerica a evreilor din România (La situation numérique des Juifs de Roumanie)", dans Jurnalul de dimineata, Bucarest, 10 août 1946 ; Sabin Manuila et Dr. Wilhelm Filderman, "Regional Development of the Jewish Population in Rumania", communication présentée au Congrès de l'Institut International de Statistique, Stockholm, 8-15 août 1957, publiée en brochure en roumain à New York, 1958 ; Aurelian Teodorescu, "Recurs pentru adevar. Cu privire la numarul victimelor din rândul populatiei evreiesti din România în anii 1940-1944" (Recours pour la vérité. A propos du nombre des victimes de la population juive de Roumanie dans les années 1940-1944), dans Revista Arhivelor, 59 (1997), n°1, p. 156-167. Voir aussi les mémoires d'un haut fonctionnaire chargé de la communauté juive sous le gouvernement Antonescu, Radu Lecca, Eu i-am salvat pe evreii din România, (J'ai sauvé les Juifs de Roumanie), Bucarest, Editura Roza Vânturilor, 1994, et la préface de Dan Zamfirescu. A comparer avec Radu Ioanid, "The Fate of the Romanian Jews under the Antonescu Regime : Statistical Data, Preliminary Conclusions", dans le volume The Jews in the Romanian History. Papers from the International Symposium, Bucharest September 30-October 4, ed. by Ion Stanciu, Bucarest, Silex, 1996, p. 201-204.
[33] George Barbul, Mémorial Antonesco. Le IIIe homme de l'Axe, Paris, Editions de la Couronne, 1950, p. 123-125 ; L. Bulat, éd., Basarabia 1940, Chisinau, Cartea Moldoveneasca, 1991 ; Gheorghe Buzatu, Asa a început holocaustul împotriva poporului român. Evacuarea Basarabiei si a nordului Bucovinei în 1940 (Le début de l'Holocauste contre le peuple roumain. L'évacuation de la Bessarabie et de la Bucovine du Nord en 1940), Bucarest, Editura Majadahonda, 1995 ; Paul Goma, Saptamâna Rosie 28 iunie-3 iulie 1940. Basarabia si evreii (La semaine rouge 28 juin-3 juillet 1940. La Bessarabie et les Juifs), Bucarest, Vremea XXI, 2004 et une nouvelle édition, "varianta ianuarie 2007", Bucarest, Anamarol, 2007. Voir aussi Ion Scurtu et Constantin Hlihor, Anul 1940. Drama românilor între Prut si Nistru (L'Année 1940. Le drame des Roumains vivant entre le Prut et le Nistru), Bucarest, Editura Academiei de Inalte Studii Militare, 1992 ; Elena Siscanu, Basarabia sub regimul bolsevic (1940-1952) (La Bessarabie sous le régime bolchevique), Bucarest, Editura Semne, 1998.
[34] Voir les reportages de Const.-Virgil Gheorghiu, futur auteur de La 25e Heure, rassemblés dans en volume sous le titre Ard malurile Nistrului. Mare reportaj de razboi din tinuturile eliberate (Brûlent les rives du Nistru. Grand reportage de guerre des territoires libérés), Bucarest, Editura Nationala Gh. Mecu <1941>, réédité à Bucarest, Editions Geea, 1993 ; le volume édité par le Gouvernement de Bessarabie, 1941>Basarabia desrobita. Drepturi istorice. Nelegiuiri bolsevice. Infaptuiri românesti (La Bessarabie libérée. Droits historiques. Crimes bolcheviques. Réalisations roumaines), Bucarest, juillet, 1942, et les ouvrages cités dans la note précédente.
[35] Adrian Riza, Retelele omeniei. Despre salvarea evreilor din nordul României (Les réseaux de la bonté. Au sujet du sauvetage des Juifs du Nord de la Roumanie), Bucarest, RAI, 1995 ; Marius Mircu, Oameni de omenie în vremuri de neomenie (Hommes bons dans des temps mauvais), Bucarest, Hasefer, 1996 ; Zoltan Tibori-Szabo, Frontiera dintre viata si moarte. Refugiul si salvarea evreilor la granita româno-maghiara (1940-1944) (La frontière entre la vie et la mort. Le refuge et le sauvetage des Juifs à la frontière roumano-hongroise), Bucarest, Compania, 2005 ; Mihai Chirea, "Cornel Dumitrescu salveaza de la Holocaust 3600 evrei" (Cornel Dumitrescu sauve 3600 Juifs de l'Holocauste), dansHistoria, 2 ( Bucarest, 2005), n° 40, p. 64-67. Voir cependant Randolph L. Braham, Romanian nationalists and the Holocaust : the political exploitation of unfounded rescue accounts, New York, Columbia University Press, 1998.
[36] Voir le témoignage de Ruth Klüger qui avec Peggy Mann a publié The Last Escape. The Launching of the largest Secret Rescue Movement of All Time, New York, Doubleday & Company, Inc., 1973 ; Ion Calafeteanu, "Regimul antonescian si emigrarea populatiei evreiesti" (Le régime d'Antonescu et l'émigration de la population juive), dans Revista Istorica, 3 (Bucarest, 1992), p. 371-384 ; 5 (Bucarest, 1994), p. 463-478 ; Ion Calafeteanu, Nicolae Dinu et Teodor Gheorghe, Emigrarea populatiei evreiesti din România în anii 1940-1944 (L'émigration de la population juive de Roumanie dans les années 1940-1944), Bucarest, Silex, 1993 ; Radu Lecca, op. cit., p. 221-225 ; Mihai Stoian, Ultima cursa : de la Struma la Mefküre (La dernière course : de Struma à Mefküre), Bucarest, Hasefer, 1995 ; Carol Bines, Din istoria imigrarilor în Israel 1882-1995 (De l'histoire des immigrations en Israël 1882-1995), Bucarest, Hasefer, 1998. Ont pu ainsi se sauver quelques personnages cités dans le livre d'Andrei Oisteanu : Ebner Mayer (en 1940), Horia Carp, Alfred Hefter et Marcel Iancu en 1941.
[37] Olivian Verenca, Administratia civila româna în Transnistria 1941-1944(L'Administration civile roumaine en Transnistrie), Chisinau, Universitas, 1993 ; 2e édition, Bucarest, Editura Vremea, 2000 ; Rodica Solovei, Activitatea guvernamântului Transnistriei în domeniul social-economic si cultural (august 1941-ianuarie 1944) (L'Activité du gouvernement de Transnistrie dans le domaine socio-économique et culturel), Iasi, Demiurg, 2004 ; Antim Nica, Viata religioasa în Transnistria (La Vie religieuse en Transnistrie), Chisinau, 1943 (l'auteur a été le chef des prêtres missionnaires envoyés par le patriarcat roumain pour faire renaître la vie religieuse - baptêmes, mariages, enterrements, réouverture des églises,etc- action qui a contribué, ensemble avec celle des Eglises ukrainienne et baltes, sans aucun doute, à la récréation du patriarcat russe par Staline en 1943). Voir pourtant Siegfried Jägendorf, Minunea de la Moghilev. Memorii 1941-1944 (Le miracle de Moghilev. Mémoires 1941-1944), Bucarest, Hasefer, 1997 ; Alexander Dallin, Odessa 1941-1944. A case of study of Soviet territory under foreign rule, Iasi, Oxford, Portland, The Center for Romanian Studies, 1998.
[38] Ioan Chiper, Florin Constantiniu, Adrian Pop, Sovietizarea României. Perceptii anglo-americane 1944-1947 (La soviétisation de la Roumanie. Perceptions anglo-américaines), Bucarest, Editura Iconica, 1993 ; Liviu Târau, "Instaurarea comunismului în România si evreii" (L'instauration du communisme en Roumanie et les Juifs), dans Transylvanian Review, 5 (Cluj, 1996), n° 4, p. 27-39 ; Dumitru Sandru, Comunizarea societatii românesti în anii 1944-1947 (la communisation de la société roumaine dans les années 1944-1947), Bucarest, Editura Enciclopedica, 2007, p. 116-132.Voir aussi Hildrun Glass, Minderheit zwischen zwei Diktaturen. Zur Geschichte der Juden in Rumänien, 1944-1949, Munich, R. Oldenbourg Verlag, 2002. (Südosteuropâische Arbeiten, 112).
[39] Roumanian Jewry and the revival of Israel, I, Roots, Tel Aviv, 1992 ; Dumitru Sandru, "Imigrarea si emigrarea evreilor (1944-1948)" (L'Immigration et l'émigration des Juifs), dans Anuarul Institutului de Istorie A.D. Xenopol, 34 (Iasi, 1997), p. 251-270 ; Hildrun Glass, op. cit., p. 102-120 ; Liviu Rotman, Evreii din România în perioada comunista. 1944-1965 (Les Juifs de Roumanie dans la période communiste), Iasi, Polirom, 2004. Ce faisant, on oubliait les cas de persécutions subies par les sionistes et par les "bourgeois" juifs, voir Dr. Th. Lavi, Nu a fost pisica neagra (Amintirile unui asir tion din România) (Ce n'était pas le chat noir. (Souvenirs d'un asir tion de Roumanie), Tel Aviv, Editura Bronfman, s.a. ; Avram Leib Zissu, Sionisti sub ancheta (Sionistes en enquête), éd. Mihai Pelin, Bucarest, Edart. F.F. Press, 1993 ; Hildrun Glass, op. cit., p. 121-300 ; L. Rotman, op. cit.
[40] Dennis Deletant, Teroarea comunista în România. Gheorghiu-Dej si statul politienesc 1948-1965 (La terreur communiste en Roumanie. Gheorghiu-Dej et l'Etat policier), Iasi, Polirom, 2001 ; Doina Jela, Lexiconul negru. Unelte ale represiunii comuniste (Le dictionnaire noir. Instruments de la répression communiste), Bucarest, Humanitas, 2001 ; Octavian Roske, Mecanismele represive în România 1945-1989. Dictionar biografic (Les mécanismes de répression en Roumanie. Dictionnaire biographique), 4 vols parus (A-M), Bucarest, Editura Institutului National pentru Studiul Totalitarismului, 2001-2005 ; Marius Oprea, Banalitatea raului. O istorie a Securitatii în documente 1949-1989 (La banalité du mal. Une histoire de la Securitate par les documents 1949-1989), Iasi, Polirom, 2002 ; Cristian Troncota, Istoria Securitatii regimului comunist din România, (Histoire de la Securitate sous le régime communiste de Roumanie) I, 1948-1964, Bucarest, ISIT, 2003 ; une édition revue sous le titre Tortionarii. Istoria institutiei Securitatii regimului comunist din România (1948-1964), Bucarest, Elion, 2006.
[41] Andrei Roth, "Cine "a adus" comunismul în România ? Supraprocentualitatea evreilor în P.C. si în organele puterii dupa 1944 - si în alte domenii" (Qui "a apporté" le communisme en Roumanie ? La surreprésentation des Juifs dans le P.C. et dans les organes du pouvoir après 1944 - et dans d'autres domaines), dans Altera, I (Târgu-Mures, 1995), n° 2, p. 136-146 ; Ioan Chiper, "Consideratii privind evolutia numerica si compozitia etnica a PCR, 1921-1952" (Considérations sur l'évolution numérique et la composition ethnique du PCR, 1921-1952), dans Arhivele Totalitarismului, 6 (Bucarest, 1998), n° 4, p. 25-44 ; Stelian Tanase, Elite si societate. Guvernarea Gheorghiu-Dej (1948-1965) (Elites et société. Le gouvernement Gheorghiu-Dej (1948-1965), Bucarest, Humanitas, 1998 ; Simion Silviu Somâcu, Radiografia puterii. Elite politice din România în anii 1945-1989 (Radiographie du pouvoir. Elites politiques de Roumanie dans les années 1945-1989), Craiova, 2003 ; Florica Dobre, éd., Membrii C.C. al P.C.R. (1945-1989). Dictionar (Les membres du Comité Central du P.C.R. 1945-1989. Dictionnaire), Bucarest, Editura Enciclopedica, 2004. Voir pourtant Robert Levy, Ana Pauker. The Rise and Fall of a Jewish Communist, Berkeley, University of California Press, 2001.
[42] Lidia Vianu, Censorship in Romania, Budapest, The CEU Press, 1998 ; Marin Radu Mocanu, Cenzura comunista (Documente) (La censure communiste. Documents), Bucarest, Editura Albatros, 2001.
[43] Tuvia Friling, Radu Ioanid, Mihai E. Ionescu, éds., Final Report of the International Commission on the Holocaust in Romania. Comisia internationala pentru studierea Holocaustului în România : Raport final, Iasi, Polirom, 2005, ouvrage accompagné d'un volume de documents édités par Lya Benjamin.
[44] Voir par exemple William Totok, "The public reception of the Wiesel Commission's final report in the Romanian and German media", dans Studia Hebraica, 5 (Bucarest, 2005), p. 186-195.
[45] Vladimir Tismaneanu, Dorin Dobrincu, Vasile Cristian, éds., Comisia Prezidentiala Consultativa pentru Analiza Dictaturii Comuniste din România. Raport final (Commission présidentielle consultative pour l'analysa de la dictature communiste en Roumanie. Rapport final), Bucarest, Monitorul Oficial, 2006 ; 2e édition révisée, Bucarest, Humanitas, 2007.
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